Les bailleurs sociaux proposent déjà des solutions, au cas par cas. Les élus du territoire demandent à l’Etat de mettre en place des reports, étalements ou effacements de loyer pour les plus fragiles.
Par Victor Tassel (@victor_tassel) et Anne Collin
Le 8 avril 2020 à 18h54, modifié le 8 avril 2020 à 19h12
Val-d'Oise Habitat, CDC Habitat et Immobilière 3 F prennent les devants. Sous l'impulsion du secrétaire d'Etat au logement, Julien Denormandie, les trois plus importants bailleurs de l'est du Val-d'Oise aident les locataires en difficulté économique. « En tant qu'acteur social, le mouvement HLM a pour mission d'accompagner ses locataires les plus fragilisés en leur proposant différentes solutions », appuie-t-on dans l'entourage du secrétaire d'Etat.
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Une réunion a eu lieu la semaine dernière, en préfecture, pour « échanger idées et se coordonner » entre bailleurs. 3 F a reçu « plus d'une dizaine » de demandes de report, notamment à Garges-lès-Gonesse où il compte 4 000 logements. « Nous incitons tous ceux qui rencontrent des difficultés à payer le loyer à nous contacter, appuie Marie-Laure Lemoine, directrice de l'agence du Val-d'Oise. Soit nous trouvons une solution ensemble, soit nous les dirigeons vers des aides, comme le Fonds de solidarité logement. »
Val-d'Oise Habitat affirme « analyser au cas par cas » les situations. « Tous les collaborateurs qui travaillent en agence sont mobilisés pour rejoindre et renforcer la cellule sociale de recouvrement, indique le bailleur, prêt à proposer des solutions. Les quittances de loyer n'ayant été envoyées que ces derniers jours, nous ne disposons pas encore de données significatives permettant d'évaluer l'impact de la crise. »
CDC Habitat va rembourser 212 professionnels
CDC Habitat, qui compte près de 2 500 logements à Villiers-le-Bel, a pour le moment concentrer ses efforts sur les baux commerciaux. 212 professionnels, payant en prélèvement automatique, vont être remboursés.
Les recouvrements de loyers ont été suspendus pour les particuliers. « Nous avons aussi décidé d'arrêter l'envoi des lettres de relance pendant la période de confinement, ajoute-t-on chez le bailleur. Nous invitons les personnes en difficultés économiques à contacter notre centre de contact client. »
Un moratoire des loyers réclamé
De son côté, la confédération nationale du logement (CNL) demande des mesures fortes de la part de l'Etat. D'urgences tout d'abord, avec la mise en place d' un moratoire des loyers dans le social mais aussi privé « tant que l'épidémie ne sera pas contenue ».
« Nous n'avons pas encore beaucoup d'alertes sur le sujet dans le Val-d'Oise, quelques-unes de personnes qui avaient déjà des difficultés. Mais cela ne signifie pas que les problèmes de paiement de loyer n'existent pas. Car par honte souvent, les gens viennent nous voir que très ,tard, lorsqu'ils ont déjà reçu des lettres d'huissier. Nous allons donc être particulièrement vigilants sur le sujet » souligne Daniel Cahorel, conseiller fédéral de la CNL.
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L'association de défense des locataires demande, dans un second temps, le report de la réforme des APL et la possibilité d'un paiement partiel. « Par exemple, un locataire ne touchant que 80 % de son salaire ne paierait ainsi que 80 % de son loyer », précise la CNL. Et cette dernière de proposer la création d'un fonds d'indemnisation des habitants, « alimenté par les amendes infligées pour non-respect des règles du confinement et par une taxation spécifique des plateformes de commerce en ligne et grands groupes ( de distribution) qui voient leurs chiffres d'affaires exploser avec la crise sanitaire actuelle ».
Des réajustements, reports de loyers demandés par les élus
Le débat s'invite dans le champ politique. L'idée de reporter les loyers a été soulevée et soutenue par des élus de l'est du Val-d'Oise. En particulier à Sarcelles, Villiers-le-Bel et Garges-lès-Gonesse, où le taux de logement social atteint, ou dépasse, les 50 %.
« Nous avons une population fragile sur notre territoire, il me paraît important de la protéger », argue Chandrasegaran Parassouramane. L'élu d'opposition (DVG) de Villiers-le-Bel a écrit au préfet et au secrétaire d'Etat au logement Julien Denormandie. Il demande que des « réajustements, reports ou effacements » soient réalisés. La lettre est cosignée par Michel Dufros, entre autres, candidat (SE, ex-LR) aux élections municipales.
François Pupponi interpelle le gouvernement
Le député (DVG) de la 8e circonscription, François Pupponi, a, lui, déjà sollicité le gouvernement sur cette question en commission des finances. Il devrait, ce mardi, réitéré sa demande à l'Assemblée nationale, à l'occasion des questions au gouvernement. « Il est indispensable que l'Etat prenne des mesures. Cela devra être réalisé au cas par cas, pour les locataires en chômage partiel ou avec une forte baisse de revenu », souligne le parlementaire.
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Une opinion partagée par le maire (PS) de Sarcelles, Patrick Haddad. L'élu estime qu'une « doctrine nationale ou départementale » doit être mise en place. « Nous éviterions les différences entre communes ou territoire, vante-t-il. La question doit être traitée dans un ensemble, avec un plan coordonné à destination des familles les plus touchées par la crise.
Des locataires touchés par le chômage partiel
Son homologue (DVG) de Villiers-le-Bel, Jean-Louis Marsac, penche pour une politique sans mesure généralisée. « C'est un travail de fond. Les efforts ne doivent pas se concentrer sur un mois. Nous le menons tout au long de l'année pour éviter les impayés et les expulsions, souligne-t-il. Nous sommes en lien avec les bailleurs de la commune pour trouver des solutions. »
À Garges-les-Gonesse aussi on entend agir en ce sens. « On s'associe évidemment à la démarche de nos collègues élus. Un courrier adressé aux bailleurs est en préparation pour les alerter et voir quels gestes peuvent être faits de façon individuelle ou globale car le chômage partiel notamment impacte déjà fortement », souligne Benoît Jimenez, adjoint au maire délégué à la cohésion sociale.