Cette barre d’immeubles HLM d’Argenteuil (Val-d’Oise) se trouve dans un état de délabrement avancé. Un programme de rénovation doit débuter début 2024. Mais il est conditionné à une augmentation de 10 % des loyers. Un vote crucial des locataires est prévu à la fin du mois.
Argenteuil (Val-d'Oise) Les habitants de la cité Champagne vont voter pour approuver ou non les travaux de réhabilitation. LP/T.C.
La plus emblématique des barres d’immeubles HLM d’Argenteuil (Val-d’Oise) est dans un sale état. La cité Champagne, qui domine toute la ville depuis la butte des Châtaigniers, continue lentement sa dégradation. Une locataire a publié récemment des photos de son logement sur les réseaux qui ont ému beaucoup d’internautes. On y voit une faille importante au niveau de la porte qui mène du salon à la chambre de son fils. Le béton s’est émietté au niveau du sol, laissant apparaître une fissure de plus de 2 cm.
C’est loin d’être le seul problème soulevé par les habitants de cette barre de 379 logements. Plusieurs locataires peuvent voir le béton de leur balcon s’effriter. « Le garde-corps bouge, souligne Moustapha, 37 ans. Il y a des fissures. » Beaucoup craignent qu’un morceau de béton ne finisse par blesser quelqu’un en tombant. La structure du bâtiment elle-même pose question. « Franchement, c’est inquiétant, ajoute Moustapha. Le problème, c’est l’ancienneté. Il n’y a rien qui a été fait. »
« Il y a des carreaux brisés, des portes et des faïences cassées, de la peinture écaillée », souligne Hanan. Moustapha évoque aussi l’humidité dans son logement et la ventilation qui ne fonctionne pas. Leila a connu quatre dégâts des eaux, à chaque fois à cause de la colonne d’évacuation des eaux usées. Celle de Michèle est aussi en mauvais état : une coulure rougeâtre progresse lentement vers le bas. « Ça fait dix ans que j’ai un trou chez moi », se plaint Danielle, octogénaire présente depuis la construction de la cité.
« On se sent abandonnés »
En plus d’un manque de travaux, les locataires déplorent un entretien insuffisant. « Même si les gens passent faire le ménage, on ne voit rien », confie Hanan. « C’est dégueulasse. On se sent abandonnés », souligne Abdel, qui déplore la fermeture de la pharmacie récemment, un des derniers commerces de la cité. Danielle souligne que c’est à partir du 7e étage que les parties communes sont sales. « Quand mes enfants viennent me voir, j’ai honte qu’ils voient ça, indique Michèle. Quand je suis arrivée en 1971, c’était nickel. » Elle évoque le comportement de ses voisins et les jets de détritus par la fenêtre (papier, hygiénique, couches, mégots…).
François Perrier, directeur d’AB Habitat, le bailleur, explique que deux appartements connaissent des failles car ils sont situés au niveau du joint de dilatation. Pour prendre en compte les mouvements du bâtiment en raison des variations de température, un petit espace sépare les différentes parties de l’immeuble. « Il faut reprendre ces deux logements », convient-il. Il ajoute que les balcons ont fait l’objet d’un audit technique et que les problèmes soulevés ont été pris en compte.
« On a enfin un programme de travaux qui va être lancé et c’est ça qui est important », souligne-t-il. Ce projet de réhabilitation a été présenté aux locataires lors d’une réunion le 18 octobre. Il prévoit une réfection des salles de bains, des WC et cuisines, ainsi que des colonnes d’évacuation. Les logements vont aussi être adaptés pour les locataires en perte d’autonomie ou qui ont un handicap. Le bâtiment doit être isolé par l’extérieur. Les abords de la résidence seront traités dans un deuxième temps, ce qui permet de limiter la facture à 17,3 millions d’euros.
Pour financer ces travaux, AB habitat prévoit une hausse des loyers au maximum de 10 %. « L’impact sera nul voire positif pour les 158 locataires qui touchent l’APL, sur 323 logements occupés », souligne François Perrier. Mais pour que les travaux puissent débuter comme prévu à la fin de l’année, il faut que les locataires approuvent ce projet et la hausse des loyers qui va avec.
« Je pense que la plupart des gens vont dire non », redoute Hanan. Elle considère que ces travaux sont nécessaires, mais son mari compte s’y opposer. Moustapha estime aussi que ces travaux sont une nécessité. « À un moment, l’augmentation de loyer, il faut l’accepter. Si ça ne bouge pas, on va à la catastrophe », estime-t-il. Il pense déménager si la rénovation n’a pas lieu. Abdel espère aussi que le oui l’emportera. « Je suis prête à me passer d’un steak mais qu’au moins on nous fasse le ravalement », annonce Michèle. Le scrutin est prévu fin novembre avec un dépouillement le 4 décembre.