BÉNÉDICTE ALANIOU ET BRUNO MAZURIER | Publié le 28.06.2012, 07h00
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Même si le loyer pèse de plus en plus lourd dans le budget des familles, les professionnels de l’immobilier avertissent des effets pervers de l’encadrement des loyers.
| (LP/MARC MENOU.)
C’était l’un des engagements du candidat Hollande. Aussitôt élu, le président a chargé sa ministre du Logement, Cécile Duflot, de rédiger un décret pour encadrer les loyers. Celui-ci doit être présenté au Conseil des ministres courant juillet. Une fois en vigueur, cette mesure interdira aux propriétaires, dans les zones les plus tendues, de dépasser le seuil de l’IRL (indice de référence des loyers, basé sur l’inflation) s’ils décident d’augmenter le loyer d’un bien lors d’une relocation.
L’équilibre est fragile
Problème, au premier trimestre, cet indice a progressé de 2,24% sur un an (la plus forte hausse depuis début 2009). Des voix s’élèvent donc pour demander un gel des loyers dans des zones comme l’Ile-de-France, « là où le marché n’est pas capable de réguler ses propres excès », précise Patrick Doutreligne, délégué général de la Fondation Abbé Pierre.
A Paris, les loyers ont en effet augmenté de 50% depuis 2001. Certes, Paris n’est pas la France. Il n’empêche, le poste loyer pèse de plus en plus lourd dans les dépenses des familles. Il n’est donc pas étonnant que l’encadrement, voire un même un gel des loyers, séduise les locataires, comme le montre le sondage réalisé par Orpi que notre journal publie en exclusivité.
Les professionnels, eux, avertissent déjà des effets pervers d’une telle mesure. La dernière loi de blocage des loyers en 1948 avait en effet abouti à une chute de la construction les années suivantes, les particuliers ayant cessé d’investir dans la pierre. L’équilibre est fragile. D’autant que les derniers chiffres publiés hier font état d’une chute des mises en chantier de 19,8% sur un an. Une tendance qui inquiète au plus haut point les experts, pour lesquels le manque criant de logements est la principale cause de la hausse continue des prix dans ce secteur. La grande loi d’orientation que prépare le gouvernement résoudra-t-elle — enfin! — cette crise persistante du logement? Réponse début 2013.
Le Parisien
Encadrer les loyers dans les zones tendues pour limiter leur progression? Les Français sont pour. A 70%, ils se déclarent en effet en faveur de la mesure qu’est en train de finaliser le gouvernement, selon le sondage réalisé par Ipsos pour le réseau d’agences immobilières Orpi*. Terminé les hausses de 3%, 4% parfois 7% à 8%, lors d’un changement de locataire.
Dès que le décret sera entré en application, les propriétaires ne pourront pas aller au-delà de 2,24%, le niveau actuel de l’IRL, l’indice de référence des loyers basé sur l’inflation. Les sondés espèrent ainsi contenir l’envolée de leurs dépenses de logement. Ils sont d’ailleurs encore plus nombreux (72%) à approuver un gel total des loyers, toujours dans les endroits où le déséquilibre entre l’offre et la demande est le plus marqué.
25 % des bailleurs pourraient renoncer à investir
Mais qu’ils soient locataires ou bailleurs, les sondés sont malgré tout conscients des limites de l’encadrement voire d’un hypothétique blocage. En effet, 45% des personnes interrogées pensent que le plafonnement de la hausse des loyers lors d’un changement de locataires entraînera irrévocablement une baisse de l’offre de logements disponibles. 25% des bailleurs déclarent d’ailleurs qu’ils pourraient renoncer à investir ou retirer leur bien du marché si l’encadrement devenait une réalité.
Chez Orpi, on souligne qu’à l’exception de quelques rares zones tendues « les prix se régulent de manière naturelle sur la majorité du territoire français ». En effet, selon l’Observatoire des loyers de la région parisienne (Olap), une association agréée depuis 1993 par les pouvoirs publics, les loyers du parc privé ont augmenté en 2011 de 2,4% à Paris et de 1,6% en province. Au niveau national, la hausse (2%) est donc restée inférieure à l’IRL (qui a augmenté de 2,11% l’année dernière). Des chiffres plutôt flatteurs pour les propriétaires mais qui masquent, en réalité, les fortes augmentations observées, à Paris comme dans certaines grandes villes de province, depuis la fin des années 1990.
Etude effectuée par Ipsos pour le compte d’Orpi les 22 et 23 juin. Elle a été réalisée par téléphone auprès d’un échantillon représentatif de 945 personnes âgées de 18 ans et plus. Méthode des quotas.
Le Parisien