Dans cette ville des Hauts-de-Seine qui compte 66% de logements sociaux, près de 500 personnes ont donné de la voix lors d’une réunion publique. Elle s’est achevée par un appel à manifester le 6 décembre sous les fenêtres du ministère du Logement.
« On ne peut pas attribuer des logements qu’on n’a pas et je m’engage à maintenir 66 % de logement sociaux sur la ville. On doit imposer des constructions et instaurer des quotas. Toute autre mesure serait du pipeau, toute autre promesse un mensonge ! » Après deux heures de débat, ce mardi soir, Patrice Leclerc, maire PCF de Gennevilliers, a achevé sa réunion sur le logement par un appel à manifester le 6 décembre devant le ministère du Logement. Objectif, réclamer davantage de logements sociaux dans la région.
Près de 500 habitants se sont pressés dans la salle des fêtes pour une soirée parfaitement huilée avec un Monsieur loyal au micro et une dessinatrice apportant un peu de peps et de légèreté sur grand écran. Les participants avaient reçu trois cartons de couleur permettant de donner leur avis selon les questions abordées : qui peut agir, faut-il davantage de HLM, quelles conditions pour accéder au logement social, les modes d’actions possibles, etc. Sur la scène, Patrice Leclerc, des adjointes au logement, à l’aménagement, la directrice du bailleur Gennevilliers Habitat, celle de la Coopérative boucle de la Seine… À chaque thème, après une brève allocution des élus, des Gennevillois ont pris la parole.
Gennevilliers c’est aujourd’hui 47 000 habitants, 66 % de HLM et 6 000 demandeurs, dont près d’un millier qui travaille dans la ville sans y habiter. « On compte 750 000 demandeurs de logements dans la région mais il ne s’en libère que 60 000 chaque année. Il faut parfois attendre onze ans pour en obtenir un. C’est inacceptable. Le logement est une cause de souffrance. Nous ne pouvons en attribuer que 400 par an. On a plus de demandeurs que d’autres villes », constate Patrice Leclerc.
Les interventions du public qui se succèdent font apparaître des situations pénibles, des dossiers qui s’éternisent, des familles nombreuses coincées dans des appartements devenus trop petits. Des voix se sont élevées pour attaquer le 50-50 qui, aux dires de certains, favoriserait le logement privé. Le 50-50, c’est cette règle en vigueur sur la ville : chaque nouveau programme immobilier doit comprendre la moitié de logements sociaux et la moitié en accession à la propriété. « Au contraire, riposte Anne-Laure Perez, maire adjointe chargée notamment de l’aménagement, l’urbanisme et l’action foncière. Elle a permis, grâce à l’accession sociale à la propriété, à des personnes sorties des plafonds du logement social de rester à Gennevilliers. »
« Tout le monde se renvoie la balle… »
Les élus ont longuement rappelé leur attachement au logement social. « 85 % des Gennevillois y sont accessibles, indique Carole Lafon, ajointe au logement. Et pas seulement les plus précaires. Ici, ils sont répartis dans tous les quartiers, pas uniquement à la périphérie. »
Lors du débat sur les conditions d’accès et les modes d’information, Hicham, un habitant du Village, prend la parole. « C’est de plus en plus compliqué, expose-t-il. On voit arriver des gens de Levallois, Clichy, Colombes, Asnières, où c’est devenu trop cher, et au final on se sent désavantagés. » « J’ai envoyé plein de courriers mais je me sens mal informée. À qui on doit s’adresser ? Tout le monde se renvoie la balle. Finalement, je connais mes devoirs mais pas mes droits », gronde un autre, très applaudi.
Au fil de la soirée, les idées et les suggestions fusent, comme celle d’une plate-forme pour échanger les logements entre particuliers dans des cas précis. « Si un couple dans un F 4 cherche un F 2 par exemple », illustre une voix. Bien vu mais compliqué à mettre en œuvre au vu des réglementations, répondent en substance les experts.
La question de l’adaptation des logements aux personnes handicapées est aussi évoquée à travers des témoignages douloureux. « Il faut se regrouper et communiquer », tonne une femme, tandis qu’une autre interroge les élus sur la possibilité d’une action juridique pour forcer l’État à construire davantage de HLM.
Faire pression sur l’État c’est justement le sens de la manifestation du 6 décembre. « On a contacté 1 200 élus franciliens. 120 d’entre eux et 22 maires seront avec nous, assure Patrice Leclerc. Mais il faut aussi se mobiliser. L’an dernier, nous n’étions que 80 devant le ministère : aussi peu, cela ne sert à rien. Le ministre du Logement, Olivier Klein, a été maire de Clichy-sous-Bois (il l’est encore pour quelques jours) : il connaît la situation, à lui maintenant de mettre les moyens. » Parmi les revendications à venir : l’obligation de construction d’un minimum de 30 % de logements sociaux dans les nouvelles opérations immobilières et en particulier autour des quartiers des nouvelles gares du Grand Paris Express, des financements d’État pour répondre aux enjeux de rénovation énergétique des logements sociaux et l’utilisation de matériaux biosourcés.