A la résidence Bocqueteau-Rougettes, les habitants ont reçu des notes à régler allant de 400 à 700 euros en moyenne. Pour la deuxième année consécutive, ils ont envoyé une pétition à Val-d’Oise Habitat pour obtenir des explications.
Cergy, ce lundi. Les locataires sont surpris des montants exorbitants que leur bailleur leur réclame pour réguler leurs charges. LP/Julie Ménard
« On ne refuse pas de payer mais on veut comprendre, qu'on nous explique d'où sortent ces chiffres car on n'est pas des vaches à lait! » Françoise et Christiane en ont ras le bol. Début août, comme les quelque 160 autres locataires de leur résidence Bocqueteau-Rougettes, à Cergy, elles ont reçu un courrier de leur bailleur social Val-d'Oise Habitat (VOH) pour la régulation annuelle des charges. Chacune doit s'acquitter d'environ 400 € pour compenser le manque de provisions sur le chauffage, l'eau, l'entretien des locaux ou encore la gestion des déchets.
« Je paye plus de 150 € de charges par mois, dont 62 € pour le chauffage collectif dans un 104 m2, résume Christiane. Comment ils en arrivent à me demander encore 460 € ? Je ne comprends pas » Françoise, elle, a fait le tour des appartements. « Personne ne paye la même chose, certains se font rembourser par VOH mais de tout petits montants et ils ne sont pas nombreux. La plupart doivent environ 400 € mais pour certains ça va jusqu'à 900 €. Il y en a même une à qui on réclame 1 100 € de régulation de charges, vous vous rendez compte ? »
Manque de chauffage et de propreté selon des locataires
Cette retraitée est d'autant plus remontée qu'elle estime « vivre dans la crasse les trois quarts du temps ». Selon elle, les parties communes de son immeuble n'auraient pas été nettoyées depuis plus d'un an. Les bornes d'apport volontaires débordent régulièrement et une porte d'accès à l'entrée de l'immeuble, arrachée au mois de mars, n'a toujours pas été remplacée. « Alors on veut bien payer mais il faut nous expliquer. »
Interrogés, de nombreux locataires se sentent eux aussi lésés. Un homme se plaint de ne pas avoir de chauffage depuis deux ans. « L'hiver le gardien m'en prête un électrique », précise-t-il. Pourtant, il doit verser 400 € à VOH pour réguler ses charges dont une importante partie pour le chauffage. Son voisin est sollicité à hauteur de 450 €. « On ne comprend pas avec ma femme, on paye autant que quand nos enfants étaient à la maison. En plus on a souvent l'eau coupée, c'est encore arrivé la semaine dernière. Mais on doit quand même payer. »
« Je vais prendre un avocat je n'ai pas le choix »
Une autre famille va être remboursée de 50 € d'après le courrier reçu. Satisfaite, elle admet ne pas pouvoir l'expliquer. « On a dû moins consommer », suppose le père. Dans le bâtiment voisin, un habitant s'énerve en abordant le sujet. « On me réclame 700 €, comment je vais faire pour payer ? En plus, on ne nous explique rien. Je vais prendre un avocat je n'ai pas le choix. »
Sur le fameux courrier, il est indiqué que les locataires ont six mois pour consulter les justificatifs attestant des montants demandés. Ils doivent contacter Val-d'Oise Habitat pour prendre rendez-vous. Plusieurs personnes assurent avoir effectué la démarche, « mais les réponses obtenues ne sont jamais les mêmes ». Remplacement d'une chaudière, fuites sur le réseau, consommation personnelle variable, ils rapportent des arguments flous et n'ont pas été invités à consulter les documents.
La situation est d'autant plus inquiétante que ces montants leur sont réclamés pour la deuxième année consécutive. Ceux qui vivent ici depuis plusieurs décennies l'affirment : « On n'avait jamais connu ça avant 2019. »
L'an passé, les locataires avaient pris l'initiative de signer une pétition et de l'envoyer à VOH pour leur demander de justifier les montants réclamés. « On n'a jamais eu de réponse mais le mois suivant, on a reçu une nouvelle régulation de charges qui avait baissé d'au moins 250 € par personne, rapporte Christiane. Ils me demandaient plus de 400 € et après la pétition, sans aucune explication, ils m'ont finalement demandé 135 €. »
Cette année encore, les habitants ont donc envoyé une pétition de 90 signatures, reçue par le bailleur le 31 août. « Et encore, beaucoup de gens étaient en vacances quand on l'a fait passée », souligne Françoise. A ce jour, ils n'ont pas reçu de réponse de la part du bailleur.
« Au titre de l’année 2018, nous avons procédé à un dédommagement exceptionnel auprès des locataires, pour raison d’insuffisance de chauffe entre le 15/11/2018 et le 31/12/2018, liée à des problèmes techniques », affirme le bailleur. Cela explique que les habitants ont reçu une facture plus raisonnable après leur première pétition.
Concernant l’année 2019, VOH explique les coûts liés au chauffage par « l’augmentation du coût de l’énergie fixé par l’exploitant et l’augmentation du prix de l’abonnement géré par l’agglomération de Cergy-Pontoise (CACP) ». Cela correspond au changement de délégation de service public dont a bénéficié Cenergy à la demande de la CACP.
Mais personne n’est en mesure de clarifier ou de chiffrer cette augmentation. Jean-Paul Jeandon, qui a repris la présidence de l’agglo cette année, avait posé la question en conseil communautaire du montant exact de l’inflation annoncée avant que le changement de contrat ne soit acté. « On m’a répondu que ça ne devrait pas beaucoup changer. J’ai relancé les services récemment pour avoir plus de précisions. »
De son côté, Cenergy nie la répercussion sur la facture des usagers. « Il n’y a pas d’augmentation du prix du chauffage pour les résidences Bocqueteau-Rougettes, indique l’opérateur. D’un point de vue général, le tarif moyen du réseau de chaleur n’augmente pas. » Et Val-d’Oise Habitat n’entre pas plus dans le détail. Pas de quoi satisfaire les locataires qui attendent toujours des réponses.