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14 octobre 2017 6 14 /10 /octobre /2017 10:45
Saint-Denis : « Être gardien, c’est tout sauf une planque ! » Rachid Santaki, écrivain
>Île-de-France & Oise>Seine-Saint-Denis>Villetaneuse|Clara Martot|10 juillet 2017, 15h36|2
Saint-Denis, juin 2017. LP/Clara Martot Rachid Santaki. 
 

Plaine Commune Habitat et Rachid Santaki ont recueilli portraits et photos dans « Gardien, un métier d’avenir ».

Connaissez-vous bien votre gardien ? Au fil de ses logements sociaux, Plaine Commune Habitat (PCH) a chargé Rachid Santaki de présenter dans un livre une douzaine d’entre eux, et autant de vies qui ne connaissent pas l’ennui. Rachid Santaki, audonien d’origine, est un écrivain et acteur culturel clé des quartiers populaires notamment via les dictées géantes qu’il organise partout en France. C’est lors d’ateliers d’écriture qu’il s’est rapproché de la figure du gardien, sur laquelle il a réalisé avec Rachid Youmelhana un court-métrage « Les gardiens ».

Comment en êtes-vous arrivé au projet « Gardien, métier d’avenir » ?

RACHID SANTAKI. Très naturellement. Je travaille avec Plaine Commune Habitat depuis 2013, et j’organise des ateliers d’écriture avec des jeunes de tout âge à Joliot-Curie (Saint-Denis). Lorsque l’on cherche, comme moi, à créer du lien social dans les quartiers, on se retrouve vite confronté au gardien car il joue un rôle central. Contrairement à ce que l’on pense souvent, il n’apparaît pas que pour régler des tensions, mais au quotidien, est en médiateur irremplaçable. Être gardien, c’est tout sauf une planque !

Comment les gardiens ont accueilli votre démarche ?

Je crois qu’ils ont été surpris par la qualité finale de la maquette : ils ne s’attendaient pas à ça. Les portraits sont enrichis par des photographies, des interviews d’autres acteurs clés du bailleur, et des références culturelles. J’aborde par exemple la question du gardien au cinéma et dans la littérature !

Parmi les propos des gardiens, avez-vous été surpris ?

Ce qui m’a surpris surtout, ce sont les parcours. Chacun a eu sa propre trajectoire ! Certains comme Areski représentent la nouvelle génération, celle qui a une connaissance du territoire et qui vit dans son quartier depuis toujours. D’autres, plus âgés, m’ont rapporté les évolutions du métier. Ce qui s’est confirmé au terme des entretiens, c’est que les locataires ont beaucoup de respect pour leur gardien.

« Je connais tout le monde. On s’attache ! »

Gardienne depuis toujours, Sylvie habite et travaille à la cité Verlaine de La Courneuve.

La Courneuve, juin 2017. Sylvie a appris sur le tas son métier de gardienne. LP/Clara Martot

« Vous seriez venue il y a cinq ans, ce n’était pas comme ça. Aujourd’hui c’est mieux, et depuis le temps, je m’y sens bien, c’est chez moi, c’est ma vie. » A peu d’années de la retraite, Sylvie, habitante du quartier, a été gardienne toute sa vie. Avec son mari, ils ont appris le métier sur le tas : « on allait remettre en marche l’ascenseur en tournant la manivelle dans la cave, mon mari allait déposer les loyers en espèce au Trésor Public, c’était des grosses sommes, j’avais un peu peur ! »

Auparavant, ils faisaient binôme à la très proche barre Henri-Barbusse de La Courneuve mais il y a quinze ans, Sylvie a simplement traversé la route : « maintenant je m’occupe du grand Verlaine, 180 logements. » Elle et son collègue Naoufel content un quotidien tout terrain : « on fait le ménage, on sort les poubelles, on visite les logements vides pour dissuader les squats. »

Matin et soir, Sylvie tient une permanence. Toujours munie de son carnet, elle note les rendez-vous avec les locataires qui, parfois trop nombreux, n’ont pas eu le temps de s’entretenir avec elle. Il est question d’eau, d’électricité ou d’ascenseur, mais la fréquence des problèmes est sans aucune comparaison avec la période d’avant la rénovation, il a cinq ans. « La vie reste tout de même parfois difficile ici. On voit des gens seuls, malades ou dans la saleté. » Mais rien qui puisse lui arracher son sourire rassurant : « il y a un respect mutuel. Je connais tout le monde, je vois les petits grandir. On s’attache ! »

« J’ai retrouvé le côté social qui me plaît »

Gardien à Aubervilliers, Arezki a fini sa formation il y a cinq mois

Aubervilliers, juin 2017. Arezki a été animateur avant de devenir gardien. LP/Clara Martot

« Je ne sais pas trop pourquoi j’aime ce métier… si je voulais le savoir, faudrait que j’aille voir un psy ! », lance Arezki sur un ton à la fois amusé et nonchalant, le regard vif. Arezki semble être toujours comme cela : calme, blagueur, et philosophe sur les bords. Il enchaîne : « il y a une théorie qui dit que ceux qui aiment travailler dans le social sont eux-mêmes des “cassos “ ! » Puis nuance : « on n’a pas forcément vécu des choses graves mais par exemple, lorsque j’étais petit, un animateur a frappé mon pote. C’est des comportements qui m’ont marqué. »

Arezki a toujours eu la veine altruiste : avant les trois ans de formation du contrat avenir qui l’a mené à ce travail de gardien, il était lui-même animateur, chez lui à Joliot-Curie à Saint-Denis, et dans d’autres ensembles de la ville. « Dans ce travail, j’ai retrouvé le côté social qui me plaît. J’aime rendre service, c’est indispensable dans ce boulot. »

Dans cet ensemble mixte, paisible et encore flambant neuf, facile de reconnaître les cinq immeubles qui délimitent sa zone d’action : « quand vous voyez des caméras à l’entrée, ce sont des copros. Sinon, c’est du social, donc c’est pour moi. » Embauché depuis cinq mois, Arezki est à l’aise… et un poil maniaque : « c’est tentant de repousser les tâches au lendemain. Quand j’arrive le lundi et que je pense au ménage et aux extérieurs, je crise. Mais je fais ! C’est plus fort que moi ! »

  leparisien.fr
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