1 503 euros brut. C’est la pension mensuelle moyenne, hors réversion, versée aux retraités vivant en France en 2019, tous régimes confondus, selon les chiffres publiés le 20 mai par la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees), dans l’édition 2021 de son rapport « Les Retraités et les retraites ».
Avec un écart toujours très important entre les montants touchés par les femmes et ceux que perçoivent les hommes, puisque les premières ont reçu une pension moyenne (1 145 euros) de 40,5 % inférieure à celle des seconds (1 924 euros). A court terme, l’écart fléchit peu, il était de 40,9 % en 2018. Il a toutefois perdu 10 points en quinze ans (il était en effet de 50 % en 2004).
Les deux principaux ressorts de ces écarts de pensions sont les différences de salaire et de durée de cotisation.
La baisse de l’écart constatée ces quinze dernières années s’explique, selon la Drees, par la progression, depuis l’après-guerre, du taux d’activité des femmes (donc de la constitution d’un droit à la retraite propre), et de leur niveau de qualification (qui réduit progressivement l’écart de rémunération). Mais aussi par la mise en place en 1972 de l’assurance-vieillesse des parents au foyer (AVPF), un dispositif qui permet d’acquérir des droits à pension au titre de l’éducation des enfants (sous conditions de ressources, d’interruption ou de réduction d’activité, etc.)
Ecart de 28 %, réversion comprise
Si l’on prend en compte les réversions des veufs et veuves, la différence de pensions entre les hommes et les femmes est ramenée à 28,1 % en 2019 (elle était de 28,2 % en 2018 et 35,4 % en 2004). La pension moyenne des femmes résidant en France passe alors à 1 399 euros brut, et celle des hommes à 1 947 euros (les réversions sont des fractions des pensions du conjoint décédé que le survivant peut, à certaines conditions toucher jusqu’à sa propre mort – les modalités varient selon les régimes).
Cet effet encore fort des réversions sur la réduction des écarts de pensions entre femmes et hommes s’explique par le fait que le montant mensuel moyen de la réversion des femmes est supérieur à celui des hommes, écrit la Drees. Mais surtout, par la surreprésentation des femmes parmi les bénéficiaires de réversion, qui constituent 87 % des près de 3,8 millions de bénéficiaires de réversion vivant en France en 2019.
Cette surreprésentation provient notamment de leur longévité supérieure, du fait qu’elles sont en moyenne plus jeunes que leur conjoint, et que les veufs ont plus souvent que les veuves des niveaux de revenus dépassant les plafonds permettant de toucher la réversion (dans les régimes où elle est soumise à une condition de ressource).
Moindre différence chez les fonctionnaires
L’écart de pension moyen entre les femmes et les hommes varie toutefois beaucoup d’un régime de retraite à l’autre. Donc d’un statut professionnel à l’autre.
L’étude de la Drees relève ainsi une différence atteignant 55 % à l’Agirc-Arrco, le régime de retraite complémentaire des salariés1, et 43 % au régime de retraite de base des artisans et commerçants. Contre « seulement » 14 % pour le régime de la fonction publique de l’Etat et 10 % au régime des fonctionnaires territoriaux et hospitaliers (la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales, CNRACL). Pour les régimes des professions libérales, le rapport indique un écart de 24 %.
Ces écarts entre femmes et hommes plus importants dans le secteur privé que dans le public ont aussi été mis en exergue dans un « focus » publié le 27 mai par l’Institut national d’études démographiques (INED), et ce, « aussi bien pour les petites pensions que dans le haut de l’échelle ».
Pourquoi ? Si, parmi les petites pensions, « les inégalités de genre sont essentiellement dues aux différences de périodes de cotisation » (les femmes ayant en moyenne des durées de cotisation moindres que les hommes, avec des carrières plus fragmentées), parmi les personnes qui perçoivent les pensions les plus élevées, l’écart de retraite entre femmes et hommes s’explique principalement par des différences de salaire de référence, détaille l’INED, s’appuyant sur un article publié en 2020 dans une revue scientifique par trois de ses chercheurs2.
Or, ces différents effets, qui jouent plus ou moins selon le niveau de pension, sont moins marqués chez les fonctionnaires que dans le privé, poursuit l’INED, qui note que « les femmes retraitées du secteur public ont eu des carrières moins fragmentées que celles du secteur privé » et que « le calcul du salaire de référence pénalise moins fortement les interruptions de carrière dans le public ».
Sont également soulignées, pour la fonction publique, « une plus grande homogénéité des parcours de travail » et « la non prise en compte des primes, plus fréquemment perçues dans les emplois à dominante masculine que féminine, dans le calcul des retraites » (hors retraite additionnelle).
1. Chiffres calculés sur les retraités ayant perçu une pension des régimes français en 2019, résidant en France ou à l’étranger, hors réversion et hors majoration pour trois enfants et plus.
2. Carole Bonnet (directrice de recherche), Dominique Meurs et Benoit Rapoport (chercheurs associés).