Le gouvernement veut lutter contre les locations de logements insalubres en pénalisant financièrement les propriétaires.
En visite ce matinà Goussainville (Val-d'Oise), Julien Denormandie, le secrétaire d'Etat auprès du ministre de la Cohésion des territoires, dévoile son plan de lutte contre les marchands de sommeil. Difficiles à identifier et rarement sanctionnés, ceux-ci bénéficient d'une impunité à laquelle le secrétaire d'Etat entend mettre fin.
Comment comptez-vous lutter contre les marchands de sommeil ?
JULIEN DENORMANDIE. Aujourd'hui on est face à un fléau : de plus en plus de personnes se spécialisent dans le business de la misère dans notre pays en louant des logements insalubres. Il faut comprendre qu'il existe en France quelque 200 000 logements insalubres. Que, chaque année, 3 000 arrêtés d'insalubrité sont prononcés, mais que seulement 80 à 90 marchands de sommeil sont finalement condamnés ! Pour briser cette impunité intolérable, nous allons inclure un plan inédit contre ces propriétaires voyous dans le projet de loi Logement en discussion.
Que prévoit ce plan ?
Nous allons considérer ces marchands de sommeil pour ce qu'ils sont, des criminels au même titre que les trafiquants de drogue, d'armes, de fausse monnaie, de tabac, d'alcool ou de contrefaçon. Pour qu'on puisse lutter plus efficacement contre ces commerçants de la misère, ils doivent être reconnus comme des trafiquants par nos textes de loi. Concrètement, nous allons modifier le Code général des impôts, élargir le champ d'application de son article 1649 en créant une présomption de revenus imputable aux marchands de sommeil. Cela va permettre à la justice de présumer qu'ils ont perçu de l'argent de la location illégale de leur logement insalubre. Cela change tout car, en renversant la charge de la preuve, il revient au marchand de sommeil de prouver qu'il n'a pas perçu de telles ressources...
Un dispositif d'amendes existe déjà et reste peu appliqué...
Lorsque le préfet signe un arrêté d'insalubrité sur un logement, il existe déjà des sanctions pénales et administratives. Un marchand de sommeil encourt en effet une peine de cinq ans d'emprisonnement et de 150 000 € d'amende maximum. Or, dans les faits, beaucoup ne sont pas condamnés car ils créent une insolvabilité apparente pour ne pas payer d'amende. Cela ne sera plus possible. Notre but est de taper là où ça fait le plus mal : au portefeuille. Ce juteux business doit cesser.
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Encore faut-il parvenir à détecter ces marchands de sommeil...
Là aussi, nous allons innover. Aujourd'hui, plus de 200 communes se sont dotées de services de lutte contre les logements indignes. Nous allons accompagner les collectivités pour qu'elles créent de telles structures capables de se battre sur le terrain. Pour les financer, nous avons prévu que les astreintes payées par les marchands de sommeil (jusqu'à 50 000 EUR par logement) leur soient directement reversées (et non plus à l'Agence nationale de l'habitat comme c'est le cas aujourd'hui). Plus on détecte, plus on est financé.
Les communes s'inquiètent aussi de l'essor des plates-formes de locations saisonnières comme Airbnb... Que leur répondez-vous ?
Il faut que les plates-formes comprennent qu'il existe en France des règles à respecter. Le projet de loi Logement prévoira des sanctions à l'égard des plates-formes qui publient des annonces qui ne respectent pas la loi. Toute plate-forme qui refusera de retirer des annonces frauduleuses qui lui sont signalées s'exposera à une amende significative.
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