La mairie d’Argenteuil a entamé une procédure contre le propriétaire en 2016 qui n’aboutira qu’en 2019. En attendant les voisins subissent nuisances, tapage nocturne, travaux incessants et problèmes d’hygiène.
Rue des Courlis à Argenteuil, un grand pavillon jaune plutôt cossu au premier coup d’œil. Des pots de fleurs et de jolis rideaux brodés sont installés à une fenêtre. Et derrière le portail flambant neuf, un large terrain de graviers. A part six boîtes aux lettres à l’entrée, des détritus et encombrants ici et là, rien ne laisserait penser que cette maison abrite entre 10 et 20 locataires. Le pavillon a en effet été divisé en six appartements, du studio au T2 loués entre 500 et 650 € selon le propriétaire, 750 € selon des locataires.
Depuis 2016, la mairie a dans le collimateur la SCI qui gère ce patrimoine de 200 m2 habitable car cette découpe a entraîné d’importants conflits de voisinage, parfois violents, avec plusieurs descentes de police. Une procédure de droit à l’urbanisme a été lancée « pour dénoncer la découpe de cette habitation en plusieurs logements sans autorisation », selon Georges Mothron, le maire (LR). L’audience aura lieu en janvier au tribunal de Pontoise.
En attendant, les voisins prennent leur mal en patience. Ils ont multiplié les signalements auprès de la mairie, la sous-préfecture, l’ancien député, l’Urssaf, pour dénoncer travaux illégaux, nocturnes, tapages et nuisances… Selon eux, les gestionnaires de la SCI sont « des marchands de sommeil qui profitent des gens dans le besoin, la plupart sans papier et ne cherchent qu’à maximiser leurs revenus ».
Jusqu’à 50 personnes logées là d’après des riverains
Selon des riverains, il y aurait eu jusqu’à 30 à 50 personnes dans le pavillon. « Il (l’un des associés de la SCI, NDLR.) vient avec son Audi cabriolet juste pour récupérer ses billets, constate Bentot. « C’est dégueulasse ! Il loge des gens avec des enfants alors que les fenêtres ferment mal, que l’électricité saute et lui, il dort dans un logement social ! », poursuit Mohamed.
« Je ne suis pas du tout un marchand de sommeil. Il y a de la jalousie dans cette histoire, réagit Gilles P., un des associés de la SCI qui confirme vivre en logement social. « Tout est en règle : aux impôts, les normes, la superficie et il y a des compteurs individuels », se défend-il. Selon lui, tout serait parti des conflits entre ses locataires et les voisins : « On a commencé à louer via le Bon Coin. Puis il y a eu du bouche-à-oreille, on est assez conciliant. On a mis des Brésiliens, des gens assez bruyants, tout est parti de là, je pense ».
La municipalité d’Argenteuil l’entend différemment. Ce dossier fait partie de la douzaine de cas actuellement traités comme habitat indigne. En tout, la ville en compterait 200 potentiels. « Les procédures sont trop longues. Les marchands de sommeil le savent et en profitent. On a beau essayé de les dissuader, les menacer, ça ne fonctionne pas. On est obligé d’aller en justice », explique le maire.
Pas toujours facile dans les cas d’habitat indigne où la faille qui pèsera en justice n’est pas toujours aisée à trouver, contrairement au logement véritablement insalubre où les affaires peuvent être résolues en deux mois. « Le fait qu’un magistrat soit dédié à tout ça, va peut-être améliorer les choses », conclut-il.
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