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22 mai 2016 7 22 /05 /mai /2016 11:05
CÉDRIC CLÉRIN
JEUDI, 19 MAI, 2016
HUMANITÉ DIMANCHE

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Patrick Nussbaum

Mobilisés, les Audoniens ont réussi à empêcher le maire (UDI) de mener à bien son projet de liquidation du logement public. Un coup d’arrêt à la chasse aux classes populaires de Saint-Ouen (93), entamée depuis 2014.

«Ça redonne de l’espoir, on en avait besoin. » C’est l’un des participants à la « fête de la victoire » qui résume l’état d’esprit des citoyens, mobilisés contre la vente de l’OPHLM par la Mairie de Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis). S’y sont retrouvés les habitants mobilisés depuis près d’un an contre le projet, avec les syndicats (CGT/CFDT), les associations de locataires (CNL) et le soutien des élus de l’opposition (FG).

« C’est une grande satisfaction et une victoire du droit sur la méthode Balkany, du passage en force », a réagi Bruno Beylat, de l’union locale CGT. Quelques jours plus tôt, la ministre du Logement, Emmanuelle Cosse, avait signifié à la Mairie son refus d’accepter l’absorption de l’OPH de la ville (Saint-Ouen Habitat, 5 700 logements) par la société d’économie mixte (SEMISO, 1 800 logements). L’État a donc refusé de valider le tour de passe-passe financier de la Mairie, à savoir vendre les logements d’un côté pour les racheter de l’autre, ce qui est interdit, ainsi que le fait que les actionnaires de la SEMISO auraient vu leur capital quadrupler sans avoir pour cela déboursé un centime d’euro. Sachant le dossier sensible, le maire, William Delannoy (UDI), élu en 2014 après 70 ans de gestion communiste de la ville, a utilisé la même méthode que Patrick Balkany à Levallois-Perret (92). Il a fusionné, avant même l’autorisation de l’État, les locaux et la comptabilité des deux entités. « Ça a marché ailleurs, mais la mobilisation unitaire a permis de déjouer ce coup de force », se félicite Bruno Beylat. « Les salariés se sont mobilisés parce que leur statut et leur avenir étaient mis en cause, explique le syndicaliste. Sans aucune garantie pour l’avenir, on a transféré, sans leur avis, des salariés d’un employeur à un autre. » L’argument avancé par le maire de Saint-Ouen, pour son opération, était de garder la maîtrise du logement, alors que les OPH vont, pour partie, être gérés au niveau des territoires, dans le cadre du Grand Paris. « L’argument de la proximité aurait été valable s’il avait été vrai, mais, dans le cadre du transfert aux territoires, les villes gardent la majorité dans le conseil d’administration et conservent la main sur les logements. Donc, il ne tient pas », réagit Frédéric Durand, président du groupe Front de gauche à Saint-Ouen, mais aussi à Plaine Commune, territoire dont dépend la ville.

Le comité citoyen qui s’est mobilisé contre la fusion craignait que la véritable raison ne soit le projet de « gentrification » de la ville, dont le maire se cache à peine. « Je n’ai pas été élu pour construire du logement social ! » avait-il lancé lors d’une séance du conseil municipal, en annonçant son projet de fusion. « William Delannoy est minoritaire à Saint-Ouen et il le sait ! argue Frédéric Durand. Il veut donc utiliser le levier du logement et celui de la fiscalité pour y faire venir une population qui défend les mêmes intérêts que lui. » L’une des premières décisions du nouveau maire avait été d’ailleurs d’augmenter les impôts locaux de 45 %, soit la plus forte hausse au niveau national. La Confédération nationale du logement (CNL) craignait qu’à cette hausse ne s’ajoute aussi celle des loyers – 20 % plus élevés à la SEMISO qu’à l’OPH. « Au final, c’est une victoire de tous ceux qui considèrent que les classes populaires ont le droit de vivre aux portes de Paris, et une preuve qu’on n’est pas obligé de subir les diktats du maire », se réjouit l’élu d’opposition.

 

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